Antoine La Rocca: lo Scomunicato
Si aujourd'hui tout le monde connaît les légendes de la pègre
Corso-Marseillaise Paul Carbone et son acolyte François Spirito, il y
avait pourtant avant eux un autre truand qui mérite amplement ses galons
de premier «grand» caïd du Milieu Marseillais : Antoine La Rocca, aussi
connu sous les noms de "l'Excommunié" ou "la Scoumoune" né le 17 Juillet 1897 à Itri, de parents d'origine Napolitaines.
Antoine La Rocca |
C'est au début des années 1900 que la famille La Rocca s'installe à
Marseille. La mère d'Antoine décède assez rapidement tandis que son
père, réputé alcoolique notoire et docker sur les quais, n'a pas
vraiment le temps de s'occuper du jeune Antoine livré à lui même.
Préférant l'école de la rue à l'école de la République, il est dès l'age
de 15 ans condamné à 2 mois de prison avec sursis pour coups et
blessures. La première expérience d'une longue série avec la justice.
Son caractère agressif et sa facilité a jouer du revolver vont faire
qu'il va vite rejoindre la Bande du quartier Saint-Jean et en prendre le
commandement. Il s'y entoure de ses amis d'enfance, Mélani, Fondacci
& Païno. La bande va exploiter la prostitution, à cette époque
l'activité principale de la pègre, et prendre le contrôle de bordels
comme «Chez Aline», «Au Cythéria» ou encore «Au Chat Noir». Le tout en
extorquant au passage quelques bars ou établissements de nuits.
A cette époque la bande de Saint-Jean est en rivalité avec la bande du
quartier Sain-Mauront menée par les trois frères Russo et secondés par
les dénommés Aïlo & Lemone. Avec la haine que se porte les deux
bandes, les hostilités ne vont pas tarder, et en 1922 les frères Russo
enlèvent la compagne d'un ami de La Rocca, qui bien sûr ne peut laisser
passer un tel affront. Ils se rendent au bar «Le Pacha» sur les quais du
vieux port, un des fiefs des frères Russo, et font feu laissant le
carreau un des frères Russo. Avant de rendre son dernier souffle, il
aurait eu le temps de glisser à l'oreille de ses proches «Vengez moi».
Les deux bandes vont alors se livrer à plusieurs règlements de comptes,
mais la bande de Saint-Jean semble prendre l'avantage.
Début 1923, ami de La Rocca vient lui apprendre que toute la bande des
Russo sera réunie au complet à l'occasion de funérailles d'un des leurs.
L'occasion est trop belle pour Antoine qui ne va pas laisser passer une
chance pareille. Alors que le convoi se dirige vers le cimetière
Saint-Pierre, La Rocca et ses hommes tirent et font 5 morts. C'est
l'indignation à Marseille et La Rocca, en plus de se forger une certaine
réputation va aussi gagner son surnom: quelqu'un capable d'un tel acte
n'est forcément qu'un «Scomunicato» (excommunié en Italien) ce qui dans
l'argot du sud va se transformer en «Scoumoune» (qui veut dire porter la
poisse). Mais La Scoumoune est plutôt chanceux avec la justice, souvent
arrêté et incarcéré provisoirement, son avocat arrive toujours à le
faire mettre en liberté. C'est pourtant pendant un de ses séjours à la
prison de Chave qu'un de ses proches, Fondacci, va se faire abattre par
les Russo.
Furieux, dans la nuit du 19 au 20 Mars 1923, armé de deux revolvers, il
décide d'aller en découdre au bar «Chez Pierre» rue Saint-Laurent, tenue
par Fine Chiqué alias «la Mariolle de Saint-Jean» également maîtresse
d'un des frères Russo. Bilan de la visite: 3 morts, incluant Fine, et un
blessé léger. Cette fois la fusillade ayant fait de nombreux témoins,
La Rocca est forcé de partir en cavale. Dans le même temps il est
reconnu coupable de la tuerie et condamné à la peine de mort par
contumace.
Après un passage à Gênes, il prend la route de l'Egypte où il s'adonne à
son activité favorite de racketteur et met sous sa coupe les souteneurs
locaux, mais son voyage tourne court car il est recherché pour avoir
tué un «client récalcitrant» Emile Scalvi. Il prend donc la direction de
Buenos Aires en Argentine vers 1924, autre plaque tournante de la
Traite des Blanches avec ses fameuses casitas (surnom donné aux maisons
closes d'Amérique du Sud).
Mais à force de trop rançonner et flinguer la concurrence et le fait que
l'Argentine ait décidé d'expulser tout ses ressortissants étrangers
spécialisé dans la prostitution (et ils sont très nombreux à cette
époque), La Scoumoune décide de changer d'air et de s'installer à
Barcelone. Il y est finalement arrêté en 1933 en compagnie de Mario
Parravicini alias «Mario l'Italien», un autre souteneur également
recherché en France pour meurtre. Après quelques mois de prison, La
Rocca est condamné en 1935 pour le triple meurtre de la rue
Saint-Laurent à 15 ans de prison et une interdiction de séjour de 10
ans. A noter que la même année Parravicini se fera flinguer lors d'une
rixe entre Corses: la patronne d'un bar qui se faisait racketter par la
bande de Joseph Marini avait demandé de l'aide à un autre truand, Joseph
Poli alias «Roger le Marseillais», et les 2 bandes s'étaient affronté à
coup de calibres dans le bar. Le futur grand patron de la French
Connection Auguste Ricord était également de la partie.
La Rocca lors de son procès en 1935 |
La Rocca est libéré en 1946 et ses anciens collègue du Milieu lui
trouvent une place de videur dans le El Monico, un nightclub de la place
Pigalle à Paris. Décidé à se refaire une place au sein du Milieu il
tente de racketter des établissements de Pigalle, mais la nouvelle
génération ne se laisse pas faire face a cette ancienne gloire
vieillissante. Antoine La Rocca est assassiné un matin d'Octobre 1947
devant le El Monico. Coïncidence ou non, son meurtre intervient au
moment ou le caïd Ange Salicetti est en train de lancer une vendetta
contre tout ceux qui lui résistent et qui fera une trentaine de victimes
au final ...
La Rocca (1) au El Monico vers 1946/1947 |
English version
Today everyone knows the legends of the Corso-Marseillais underworld Paul Carbone and his sidekick François Spirito. However, there was another mobster before them who amply earned his stripes as the first "great" boss of the Marseille Milieu: Antoine La Rocca, also known as "l'Excommunié" or "la Scoumoune".
Antoine La Rocca |
Born on July 17, 1897 in Itri, La Rocca and his family moved to Marseille in the
early 1900s. Antoine's mother died fairly quickly while his father, a
notorious alcoholic and dock worker, did not have the time to take care
of young Antoine on his own. Preferring the school of the street to the
school of the Republic, at age of 15 he received a 2 month suspended
sentence for assault and battery. This was his first encounter in what
will be a long battle with justice.
His aggressive character and the ease to which he resorted to the
revolver led him to quickly join the Gang of the Saint-Jean district,
which he soon took command of. He surrounded himself with his childhood
friends, Mélani, Fondacci & Païno. The gang started a prostitution
ring, at that time the main racket of the underworld, and took control
of brothels such as "Chez Aline", "Au Cythéria" or "Au Chat Noir". All
while extorting a few bars or nightlife establishments.
At the time, the Saint-Jean gang was competing with the Sain-Mauront
neighborhood gang led by the three Russo brothers and assisted by the
so-called Aïlo & Lemone. With shared hatred between the two gangs,
war was inevitable. In 1922 the Russo brothers kidnapped the girlfriend
of a friend of La Rocca, who couldn’t let such an affront pass. They
went to the bar "Le Pacha '' on the docks of the old port, one of the
strongholds of the Russo brothers, and shot one of the Russo brothers
dead. Before taking his last breath, he had the time to whisper in the
ears of those close to him "Avenge me". The two gangs would then engage
in several settling of scores, but the Saint-Jean gang took the
advantage.
At the beginning of 1923, a friend of La Rocca came to tell him that the
whole Russo band would all be reunited for the funeral of one of their
own. The opportunity was too good for Antoine, who wouldn’t let such an
opportunity pass. As the convoy headed toward Saint-Pierre cemetery, La
Rocca and his men shot and killed 5 people. The vicious killings earned
him the nickname "Scomunicato" (excommunicated in Italian) which in
southern slang will turn into "Scoumoune" (which means to bring bad
luck). But La Scoumoune is rather lucky with the justice system, often
arrested and provisionally imprisoned, his lawyer always manages to get
him released. However, during one of his brief prison stays, one of his associates, Fondacci, was shot by the Russos.
On the night of March 19 to 20, 1923, furious and armed with two
revolvers, he decided to visit the bar "Chez Pierre" rue Saint-Laurent,
run by a mistress of one of the Russo brothers Fine Chiqué alias "la
Mariolle de Saint-Jean". Results of the visit: 3 dead, including Fine,
and one slightly injured. With so many witnesses to the shooting, La
Rocca was forced to go on the run. He was found guilty of the killings,
and sentenced to death in absentia.
After passing through Genoa, he traveled to Egypt where he fell back
into his favorite activity, racketeering, taking control of the local
pimps. His trip was cut short after he became wanted for killing a
"recalcitrant customer”, Emile Scalvi. After that, he fled to Buenos
Aires, Argentina around 1924, another hub of the White Slave trade with
its famous casitas (nickname given to brothels in South America).
There, he quickly extorted and gunned down the local competition. This
coupled with the fact that Argentina had decided to expel all the
foreign nationals specializing in prostitution (of which there were
numerous at that time), La Scoumoune decided on a change of scenery,
settling in Barcelona. He was finally arrested there in 1933, along with
Mario Parravicini alias "Mario l'Italien", another pimp also wanted in
France for murder. After a few months in prison, La Rocca was sentenced
in 1935 for the triple murder of the rue Saint-Laurent to 15 years in
prison and a 10-year residence ban. That same year Parravicini was
gunned down during a fight between Corsicans: the boss of a bar that
extorted by the Joseph Marini’s gang, had asked for help from another
thug, Joseph Poli alias "Roger le Marseillais", and the 2 gangs had shot
it out in the bar. The future big boss of the French Connection Auguste
Ricord was also there.
La Rocca during his trial in 1935 |
La Rocca was released in 1946 and his former colleagues in the Milieu
found him a place as a bouncer in El Monico, a nightclub in Place
Pigalle, Paris. Deciding to find a place for himself in the Milieu, he
tried to extort money from establishments in Pigalle, but the new
generation resisted this aging glory of the mob. Antoine La Rocca was
assassinated in a morning of October 1947 in front of the El Monico.
Coincidence or not, his murder came at a time when the boss Ange
Salicetti was launching a vendetta against all those who resisted him,
resulting in thirty victims by the end ...
La Rocca (1) at El Monico circa 1946/1947 |
Commentaires
Enregistrer un commentaire